Souvenirs du Rwanda: Imigongo

Dans ce deuxième article de la série « souvenirs du Rwanda », j’aimerais vous présenter l’art Imigongo. Ces peintures sont d’authentiques et magnifiques objets à rapporter à la maison pour vous rappeler le pays des mille collines. Bien qu’ayant fait son apparition au 18e siècle, cet art pourrait bien être qualifié de contemporain. Il décorera à merveille l’intérieur de n’importe quelle résidence moderne et vous surprendrez vos invités lorsque vous leur direz avec quoi sont faites ces petites œuvres d’art!

Imigongo est le pluriel du mot Umugongo qui a plusieurs significations : le dos d’une personne ou d’un animal, la crête d’une colline, la nervure d’une feuille, etc. Dans l’art rwandais, on désigne par le terme Imigongo les peintures aux motifs géométriques dominants, réalisées à partir de bouse de veaux (plus ferme et uniforme que celle des vaches), qui sont en relief avec des arêtes saillantes.

Il est difficile de déterminer l’origine exacte de ces peintures, mais deux chercheurs qui ont étudié les Imigongo, Georges et Thérèse Celis, ont fait ressortir un nom, celui du prince Kakira, fils du mwami (roi) Kimenyi Getura, qui a vécu au 18e siècle sur la colline Nyarutunga, dans la région des « Imigongo ». Kakira avait la saleté en horreur. Mais il était très créatif. Aussi, par souci de propreté, il commença à décorer l’intérieur de sa case avec des motifs géométriques. Son père fut très enthousiasmé par ces ornements et décida que cet endroit serait réservé pour accueillir les invités de marque. Kakira, fier de son succès, incita les jeunes filles de la cour à faire comme lui. Plus tard, son fils Runiga propagea cet art que nous connaissons maintenant sous le nom de Imigongo.

Il y a longtemps

Un prince du nom de Kakira

Eut l’inspiration de transformer terre, eau, feu

Plantes médicinales et produits de la vache si respectée

En décorations « magiques »

Motifs qui rayonnent une force particulière et s’échappent

Dans une répétition infinie

Des limites que leur support pense pouvoir leur imposer

Texte tiré du livre « Imigongo », Anne Maes-Geerinckx et Lode Van Pee, page 50

L’art Imigongo est donc propre à la région du sud-est du Rwanda, près de la frontière de la Tanzanie. Quatre étapes sont nécessaires à la réalisation de ces peintures.

Première étape : la recherche des matériaux

Cet art est traditionnellement exécuté par les femmes. Ce sont elles qui ramassent les matériaux. Pour récupérer la bouse de veaux, les femmes suivent les troupeaux qui se déplacent constamment à la recherche de nourriture. La bouse est considérée par les éleveurs comme une matière noble et sert à de nombreux usages. Au Rwanda, les vaches font partie de la culture et sont des animaux très précieux pour ceux qui ont la chance d’en posséder.

Les couleurs sont d’origine minérale, sauf le noir qui est d’origine végétale. Les femmes parcourent les collines pour trouver la terre qui donnera les couleurs utilisées, soient le blanc, le rouge brun, le gris perle et le jaune beige. On écrase le minéral et on le mélange à un peu d’eau pour donner le pigment. Le noir est plus compliqué à obtenir. On coupe les feuilles d’un aloès (igikakarubamba) pour récolter son jus. On mélange celui-ci avec de l’urine de vache dans un pot où il noircira pendant trois jours.

Deuxième étape : le dessin

L’artiste dessine sur un morceau de bois, avec l’aide d’un charbon de bois ou d’un crayon, les motifs géométriques qui formeront l’Imigongo. Elle utilise une « latte » végétale pour se guider et obtenir les proportions voulues. Il existe plusieurs motifs traditionnels, toujours géométriques, faits de lignes courbes ou droites. Ainsi, on trouve sur les Imigongo des triangles (isocèles ou équilatéraux), des losanges, des parallélogrammes, des carrés, ou des spirales simples ou doubles. Ces mêmes motifs apparaissent sur la vannerie, la boiserie, la poterie et les parures rwandaises.

Troisième étape : le modelage

Pour obtenir la pâte qui servira au modelage, les femmes mélangent de la cendre et de l’urine à la bouse. Ensuite, avec le pouce et l’index, elles recouvrent la surface et fixent la pâte en suivant le motif. On obtient de cette manière de fines crêtes et des sillons qui sont spécifiques aux Imigongo. Pour rendre la surface plus lisse, les femmes utilisent une substance légèrement « savonneuse » obtenue à partir d’une plante appelée umutobotobo. On fait sécher le tout 24 heures avant de passer à la dernière étape.

Quatrième étape : la peinture

Avant d’appliquer les couleurs, les femmes recouvrent l’œuvre d’une couche jaune-beige, telle une couche de fond (primer). Cette couche uniformise l’oeuvre et rend les couleurs appliquées par la suite plus claires (surtout pour le blanc). Finalement, les femmes étendent les couleurs et font sécher.

Pour voir des photos des étapes de la conception des Imigongo, cliquez ici.

Vous pouvez également regarder une petite vidéo très intéressante sur les étapes de la création artistique Imigongo de la Maison de quartier (maison pour les veuves rescapées du génocide à Kimironko).

L’art Imigongo a failli être perdu pendant le génocide, car il était transmis oralement de génération en génération. La plupart des femmes qui connaissaient cet art sont mortes pendant le génocide et les maisons qui en étaient décorées furent détruites. Mais en 1997, certaines veuves ont décidé de faire revivre cette tradition en créant l’association Kakira, à Kavuzo, dans le district Rusumo. Leur production resta peu importante jusqu’en 2001, où l’association reçut de l’aide extérieure et l’opportunité d’en faire la promotion, ce qui permit de vendre leurs œuvres à Kigali et à l’étranger.

Aujourd’hui, différentes associations de femmes sont initiées à cet art. Certaines ont même demandé à des artistes de créer, à partir des motifs traditionnels, de nouvelles structures. Le résultat est aussi intéressant que les tableaux originaux.

Vous pouvez voir quelques œuvres en suivant ce lien : Galerie photos de Imigongo

Un livre a été réalisé par l’association Umubano, à l’occasion de l’exposition « Imigongo iut Rwanda » qui a eu lieu en Flandre, en 2004-2005. Celui-ci renferme de splendides photos du Rwanda et des peintures Imigongo. Il fera assurément un merveilleux souvenir si vous ne pouvez rapporter une peinture originale Imigongo.

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